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Tuesday, September 25, 2012

Alfred de VIGNY - La Mort du Loup

Alfred de VIGNY
(1797-1863)


La Mort du Loup
https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhGAbzsy1WskSzDh-UZZTfTdt8KYETWhkK5AUFIPXrxoFe6vOXfmhtsnJJI1AzzKj6AzF_C4gyndqtk2S5coV_k5IrjPg3mSQYDvHiHFgXV3DBwoznZWYUZlKI2i1zQBBlGHYpewmCnVCc/s320/gray-wolf-hunt-01.jpg
I
Les nuages couraient sur la lune enflammée
Comme sur l'incendie on voit fuir la fumée,
Et les bois étaient noirs jusques à l'horizon.
Nous marchions sans parler, dans l'humide gazon,
 
Dans la bruyère épaisse et dans les hautes brandes,
Lorsque, sous des sapins pareils à ceux des Landes,
Nous avons aperçu les grands ongles marqués
Par les loups voyageurs que nous avions traqués.
Nous avons écouté, retenant notre haleine
Et le pas suspendu. -- Ni le bois, ni la plaine
Ne poussait un soupir dans les airs ; Seulement
La girouette en deuil criait au firmament ;
Car le vent élevé bien au dessus des terres,
N'effleurait de ses pieds que les tours solitaires,
Et les chênes d'en-bas, contre les rocs penchés,
Sur leurs coudes semblaient endormis et couchés.
Rien ne bruissait donc, lorsque baissant la tête,
Le plus vieux des chasseurs qui s'étaient mis en quête
A regardé le sable en s'y couchant ; Bientôt,
Lui que jamais ici on ne vit en défaut,
A déclaré tout bas que ces marques récentes
Annonçait la démarche et les griffes puissantes
De deux grands loups-cerviers et de deux louveteaux.
Nous avons tous alors préparé nos couteaux,
Et, cachant nos fusils et leurs lueurs trop blanches,
Nous allions pas à pas en écartant les branches.
Trois s'arrêtent, et moi, cherchant ce qu'ils voyaient,
J'aperçois tout à coup deux yeux qui flamboyaient,
Et je vois au delà quatre formes légères
Qui dansaient sous la lune au milieu des bruyères,
Comme font chaque jour, à grand bruit sous nos yeux,
Quand le maître revient, les lévriers joyeux.
Leur forme était semblable et semblable la danse ;
Mais les enfants du loup se jouaient en silence,
Sachant bien qu'à deux pas, ne dormant qu'à demi,
Se couche dans ses murs l'homme, leur ennemi.
Le père était debout, et plus loin, contre un arbre,
Sa louve reposait comme celle de marbre
Qu'adorait les romains, et dont les flancs velus
Couvaient les demi-dieux Rémus et Romulus.
Le Loup vient et s'assied, les deux jambes dressées
Par leurs ongles crochus dans le sable enfoncées.
Il s'est jugé perdu, puisqu'il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris ;
Alors il a saisi, dans sa gueule brûlante,
Du chien le plus hardi la gorge pantelante
Et n'a pas desserré ses mâchoires de fer,
Malgré nos coups de feu qui traversaient sa chair
Et nos couteaux aigus qui, comme des tenailles,
Se croisaient en plongeant dans ses larges entrailles,
Jusqu'au dernier moment où le chien étranglé,
Mort longtemps avant lui, sous ses pieds a roulé.
Le Loup le quitte alors et puis il nous regarde.
Les couteaux lui restaient au flanc jusqu'à la garde,
Le clouaient au gazon tout baigné dans son sang ;
Nos fusils l'entouraient en sinistre croissant.
Il nous regarde encore, ensuite il se recouche,
Tout en léchant le sang répandu sur sa bouche,
Et, sans daigner savoir comment il a péri,
Refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri.

II

J'ai reposé mon front sur mon fusil sans poudre,
Me prenant à penser, et n'ai pu me résoudre
A poursuivre sa Louve et ses fils qui, tous trois,
Avaient voulu l'attendre, et, comme je le crois,
Sans ses deux louveteaux la belle et sombre veuve
Ne l'eût pas laissé seul subir la grande épreuve ;
Mais son devoir était de les sauver, afin
De pouvoir leur apprendre à bien souffrir la faim,
A ne jamais entrer dans le pacte des villes
Que l'homme a fait avec les animaux serviles
Qui chassent devant lui, pour avoir le coucher,
Les premiers possesseurs du bois et du rocher.

Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes,
Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !
Comment on doit quitter la vie et tous ses maux,
C'est vous qui le savez, sublimes animaux !
 
A voir ce que l'on fut sur terre et ce qu'on laisse
Seul le silence est grand ; tout le reste est faiblesse.
- Ah ! je t'ai bien compris, sauvage voyageur,
Et ton dernier regard m'est allé jusqu'au coeur !
 
Il disait : " Si tu peux, fais que ton âme arrive,
A force de rester studieuse et pensive,
Jusqu'à ce haut degré de stoïque fierté
Où, naissant dans les bois, j'ai tout d'abord monté.
 
Gémir, pleurer, prier est également lâche.
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie où le Sort a voulu t'appeler,
Puis après, comme moi, souffre et meurs sans parler. "




Vigny is in fact considered a philosopher rather than a literary author, is to remember that it is also one of the first French writers to be interested in Buddhism.

If his philosophy of life is pessimistic and stoical, it should be given the importance it gives to the brotherhood of men, as well as the values of culture, knowledge and solidarity. employs several years to write the second volume of poems “Les destinées “(The Fates), which concludes with his final message to the world,” L’esprit pur “(pure spirit), this work was published after his death in Paris on September 17, 1863.

Commentaire composé : Vigny : La Mort du Loup
Introduction :
Texte faisant parti des Destinées, publiées en 1864 après la mort de l’auteur. De Vigny a écrit ce texte à la suite d’une série de difficultés dans sa vie. Alfred de Vigny est choqué par son époque, sa mère est morte et il s’est séparé de sa femme.

I. LE DIMENSION PHILOSOPHIQUE

Le mouvement du stoïcisme est apparu avec Zénon. Sa morale est fondée sur la souffrance. « Stoa » en grec signifie le portique. Les philosophes du stoïcisme, aussi appelés les philosophes du portique, considèrent qu’il faut supporter sa destinée comme les colonnes supportent le toit.

La clé du texte se trouve au vers 83, avec « stoïque fierté ». Stoïque qualifie soit les adeptes du stoïcisme, soit les personnes ayant le même comportement, mais n’étant pas des adeptes. La devise du stoïcisme est « Supporte et abstiens-toi ». Le texte présent une correspondance de structure avec la phrase : « Souffre et meurt sans crier ».

Cela souligne l’importance qu’Alfred de Vigny donne à la vie et à la mort. En effet, les stoïciens étaient adeptes du suicide, préparé, calculé et froid. Alfred de Vigny n’adhère pourtant pas à cet aspect. « Souffre » est une référence à sa propre mort. Il donne une réflexion sur l’existence que l’on quitte sans regret. Il donne une nouvelle devise, qui est basée plus sur la mort que sur la vie.

II. LE SYMBOLISME DU TEXTE

La louve romaine, vers 38. C’est un mythe : la louve romaine a allaité Romulus et Remus, les fondateurs de Rome. Il y a une analogie entre cette louve qui donne le lait aux deux enfants et le loup qui donne sa philosophie à l’auteur. Tout ceci justifie la partie III par rapport aux deux précédentes, et le discours du regard du loup. Alfred de Vigny renverse le mythe du loup cruel : le loup prédateur devient en effet le loup donateur.

Les majuscules dans la troisième partie, du vers 73 à 87. « Homme » représente l’idéal humain, la vision stoïcienne de l’homme pur. « débiles » vient remettre les choses en place et traduit le pessimisme d’Alfred de Vigny sur la condition humaine. « Sort » est une allégorie, une personnification du destin ou des destinées (le titre de l’œuvre). C’est la lutte de l’homme contre sa destinée. On observe le loup face au chasseur et l’homme face à son destin.

Le loup ne parle pas directement, l’auteur se fait son interprète. Il y a plus de réalisme car le loup ne fait pas de surnaturel. Ceci s’oppose aux autres auteurs (LF donne la parole aux animaux dans Le Loup et le Chien , ou Anouilh qui fait parler le loup face à ses petits, dans Le Loup, La Louve et les Louveteaux). Le loup sert ici de prétexte à une réflexion sur la mort, une morale philosophique.

Les quatre derniers vers ne s’adressent à personne et reprennent la devise générale, ils mettent en valeurs le stoïcisme. « gémir, pleurer, prier, sont également lâche » L’accord souligne une règle antique (« sont » ne devrait pas s’accorder au pluriel mais avec le dernier verbe), ce qui est une référence à l’origine du mouvement stoïque. (=dimension historique du texte)

Alfred de Vigny et Anouilh pensent tous deux que le chasseur ne sort pas vainqueur. Pourtant, ils ont des points de vue différents sur le thème de la chasse. Pour Alfred de Vigny, il s’agit de parler de la mort et non de la chasse (le titre en est un parfait exemple : la mort du loup, et non pas la chasse au loup), la destinée du loup est la destinée potentielle du chasseur. Pour Anouilh, la chasse est un prétexte à la réflexion sur la cruauté.

Les passages sont disproportionnés. Le 1er paragraphe est très long, il donne un côté épique au loup qui est grandi et magnifique. Les paragraphes 2 et 3 constituent un retour à la réalité, c’est à dire à la petitesse de l’Homme.

Conclusion
Ce texte n’est pas un hymne à la chasse, c’est une illustration de l’épopée du loup. Alfred de Vigny conditionne le lecteur pour qu’il admette sa philosophie. On peut considérer ce texte comme une sorte de fable : l’animal est utilisé au profit de l’auteur.





Travail sur la mort du Loup:

http://tsst-louis2011-12.forumgratuit.org/t22-la-mort-du-loup-etude

 http://www.lescorriges.com/article-12653--vigny__la_mort_du_loup.php

http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/alfred_de_vigny/la_mort_du_loup.html

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